mercredi 9 janvier 2013

Fidji (1) : Couchsurfing à Nadi




Salut à tous !

Je vous publie ce billet écrit quand j'étais aux Fidji, il y a un mois exactement. 

"Je vous écris en ce moment depuis une île de l'archipel Yasawa aux Fidji. Eh oui cet été a démarré sur les chapeaux de roue pour moi et n'est pas près de s'arrêter de sitôt. A peine terminé mon voyage sur la Gold Coast australienne, je me suis envolée pour Nadi (prononcer « Nandi »), aéroport principal des Fidji. Comme c'est une destination chère et peu prisée des étudiants en échange à Sydney, je n'ai pas trouvé de compagnon de voyage. Cela ne m'a pas empêché de partir, au contraire ! J'en ai profité pour expérimenter ce que je n'aurai pu faire que difficilement si j'avais été accompagnée : du couchsurfing.

Je m'explique : au moment d'organiser mon voyage, tout ce que je trouvais pour les Fidji renvoyait à des tours d'îles paradisiaques faits spécialement pour les touristes. Moi je trouvais vraiment dommage de partir à l'autre bout du monde pour se retrouver dans un complexe touristique fermé à barboter dans une piscine. Alors j'ai cherché un moyen de partir à la rencontre des locaux qui ne me coûterait pas trop cher. Et le couchsurfing s'est imposé de lui-même. C'est un réseau social développé sur internet qui met en contact des personnes voulant voyager avec d'autres pouvant les accueillir. Le service est gratuit mais ce n'est pas un hôtel : il s'agit d'un système basé sur la réciprocité où chacun fait partager sa propre culture à l'autre.

Après avoir crée mon profil sur le site et exposé mes plans de voyages au réseau, j'ai été contactée par Save. C'est un père de famille qui vit près de Nadi (et donc de l'aéroport). C'est un hôte accompli qui a déjà accueilli environ 500 personnes chez lui. Au vu de ses références et après plusieurs mails échangés, nous avons convenu que je passerai trois jours chez lui avant de partir visiter les îles Yasawas et Mamanucas. Save a en plus l'avantage de travailler comme agent de voyage et avait promis de m'aider à organiser mon voyage pour qu'il me convienne et ne me coûte pas trop cher.

Trois heures et demi d'avion plus tard, j'atterrissais à Nadi où Save m'attendait comme prévu. 

Comité d'accueil musical à l'aeroport :)

Arrivée chez lui j'ai été assez déconcertée. Je ne savais pas vraiment à quoi m'attendre avant de venir mais je ne pensais pas que le choc des cultures et du niveau de vie puisse être si fort alors même que l'Australie était si proche. La maison était petite et consistait en quelques mur et un bout de tôle en guise de toit. Il n'y avait que peu ou pas de meubles et les pièces n'étaient séparées que par de longs morceaux de tissus qui tapissaient également le sol. Cela n'a pas entamé mon enthousiasme pour autant, car tous les membres de la famille semblaient heureux de m'accueillir et me souriaient affectueusement. A peine arrivés, Save m'a montré une petite chambre dans un coin qui me sera destinée et m'a dit de m'assoir sur le sol au milieu de la pièce pour le dîner. C'est à ce moment là que j'ai compris l'absence de meubles. Les fidjiens vivent au sol : ils y mangent, y dorment et y prient tous ensembles. Si des meubles avaient été entreposés dans la pièce, cela n'aurait été qu'une perte de place.

Nani et Save, mes hôtes

Le repas était simple mais revigorant après mon long voyage. J'ai tenté un brin de conversation mais tous étaient timides et c'était difficile. Histoire de briser la glace, je suis allée cherchée les cadeaux que j'avais achetés pour eux : du rhum pour le père de famille (Save), du parfum pour la mère (Nani) et des chocolats et des biscuits pour les enfants. Ils étaient trois, deux garçons de 10 et 7 ans (Marcu et l'autre je n'ai pas compris son nom) et une petite fille de un an et cinq mois (Kiasa). Ils se sont jetés sur les sucreries, je pense donc que mon idée était bonne !


La maison de Save

Le salon/bureau/coin de prière/chambre

Les toilettes/salle de bain

Le couloir vers la cuisine

Mon lit squatté par Kiasa :)

Ce que je ne savais pas c'est que la famille de Save est plus grande qu'elle n'y paraît. Il héberge également sa cousine (de 30 ans) et deux de ses nièces (Ana, 17 ans et une autre dont je n'ai pas compris le nom qui a 20 ans). Quand elles m'ont dit bonjour j'étais un peu embarrassée car je n'avais rien pour elles vu que je ne savais pas qu'elles vivaient ici elles aussi. Mais elles étaient si gentilles avec moi que c'est vite passé.




Après le repas, Save m'a expliqué qu'il y aurait le lendemain un service religieux important pour la famille. D'ailleurs les filles allaient y danser et devaient se préparer. On m'expliquait alors qu'avant la messe catholique, il était de coutume de chanter et de danser, un peu comme le gospel en Amérique, la danse en plus. Et pour mieux me faire comprendre, les filles ont mis de la musique et se sont mises à danser. C'était une chorégraphie simple qui allait de pair avec les paroles de la chanson. Vu mon air intrigué, les filles m'ont invitée à danser avec elles. J'ai acceptée, ravie mais quelque peu gênée par mon manque d'habilité. Mais ma maladresse les a fait rire, ce qui m'a finalement mise en confiance. Après plusieurs essais ma danse commençait à ressembler un peu à quelque chose, voyez vous-même !




Exténués par cet exercice nocturne, nous sommes finalement allés nous coucher. Mon lit était dur, mais j'avais au moins le mérite d'en avoir un, ce qui n'était pas le cas de tous les membres de la famille, dont certains dormaient par terre, serrés les uns contre les autres. Cela m'a énormément gênée, je me sentais injustement privilégiée. Je n'ai cependant rien dit, de peur d’offenser mes hôtes. Plus tard, j'ai appris qu'il était de coutume aux Fidji d'offrir son meilleur lit à son invité.

Au matin, j'ai été réveillée par une douce musique fidjienne et les vas et viens des uns et des autres se préparant pour la journée. J'ai eu du mal à émerger, à cause du décalage horaire, j'avais perdu deux heures et il était pour moi 4 heures du matin. Save m'a accueilli avec un bon café au lait, et Nani avec des beignets locaux qu'ils appellent là-bas pancakes. Je les mangeais avec délice en compagnie des deux garçons, tous les deux en uniforme en préparation de l'école. Save préparait leur déjeuné et leur a glissé quelques uns des biscuits que je leur avais amenés la veille. Il y avait un koala sur la boîte, et Save réussit à faire croire à ses fils que les biscuits étaient faits à partir de crotte de l'animal. Ils ont regardé les biscuits avec méfiance pendant une bonne vingtaine de minute avant de bien vouloir les goûter.



Kiasa, la petite dernière de la maison, en train d'essayer mes tongs :)




Les garçons partis, Save m'a aidé à planifier mon voyage. Ce sera donc 9 jours (qui se transformeront au final en 11 jours) dans les îles paradisiaques avant de revenir à Viti Levu (l'île principale). Les hôtels réservés, il ne me restait qu'à aller à l'aéroport pour confirmer mon billet pour le ferry. C'est Ana qui m'y a emmenée. Nous y sommes allées en bus sous un soleil brulant et un air bien humide.


Vue sur le village depuis l'arrêt de bus

Ana vit avec son oncle pour son éducation. Elle est au lycée à Lautoka (une ville à une demi-heure au nord de chez eux) et veut devenir infirmière. Elle parle très bien anglais car elle l'a appris à l'école. La jeune génération parle d'ailleurs bien mieux la langue que ses ainés qui ont plus de mal.




Après l'aéroport, Ana m'a emmené dans le centre-ville de Nadi histoire de faire quelques courses. Save m'avait ordonné d'acheter un pack de 6 bouteilles d'eau à emmener sur dans les îles. Je n'avais pas compris pourquoi sur le coup, mais après réflexion, bien m'en a pris. L'eau n'est pas potable sur les îles et est vendue environ 5 dollars fidjien sur place. J'ai payé mon pack moins de 2 dollars. Nous en avons profité pour acheter des bananes sur le marché en vue du service de la soirée.


Quelques maisons aperçues sur la route depuis le bus


Me demandez pas ce que c'est je sais pas
Ca non plus !



Ana a voulu me montrer un temple hindou qui apparemment est le plus grand des Fidji. Il y a une grande proportion d'indien aux Fidji, dû à une forte immigration par le passé. C'est un peu surprenant au premier abord, mais la culture hindoue se mêle bien à la fidjienne et les deux ethnies semblent vivre ensemble pacifiquement. Pas de chance, ce jour-là le temple était fermé. Je n'ai donc pu l'admirer que de l'extérieur.







Une fois rentrées, nous avons mangé quelques nouilles et de la pastèque, que Kiasa a adoré. Il faisait trop chaud à l'intérieur de la maison pour y rester, Nani cuisinait donc à l'extérieur. Elle préparait un espèce de banana bread à la noix de coco avec les bananes achetées plus tôt et une noix de coco cueillie sur un arbre du jardin. Kiasa, plus vive que jamais, courait de partout et essayait de piquer des bananes à sa mère. Les noix de coco des Fidji n'ont rien en commun avec celles que nous avons en Europe, si ce n'est le nom et l'apparence. Elles sont pleines de lait et Nani pressait la noix de coco rappée pour le sortir.















Le soir, deux évènements se préparaient. Le premier incluait la préparation d'un plat typique fidjien pour moi et le père de Save qui arrivait de Suva (la plus grande ville de Viti Levu) : du poisson à la noix de coco servi avec des espèces de pommes de terre sèches donc j'ai oublié le nom. Tout ce que je peux vous dire c'est que c'était délicieux, surtout avec les petits piments très forts cueillis dans le jardin ! Par contre, ce sont les filles qui avaient préparé le dîner, mais seuls le père de Save et moi l'avons mangé. Je ne sais pas si la coutume veut qu'on ne donne un bon repas comme ça qu'aux invités ou si la vraie raison tient au fait que ce type de nourriture coûtait cher et que la famille ne pouvait pas se permettre d'en offrir à tout le monde. Je n'ai pas osé poser la question.











Le deuxième événement en préparation était bien sûr le service religieux qui, je ne le savais pas, avait lieu dans le jardin de ma famille. L'évènement avait failli être annulé à cause d'une forte pluie tombée en moins de cinq minutes. Mais le soir était légèrement plus sec et tout le monde était venu. Toute la famille était sur son 31 : les hommes portaient de belles chemises avec de longues jupes noires traditionnelles fidjiennes quand les femmes portaient des longues robes de couleurs bariolées. Pour mieux m'intégrer, j'ai eu la chance qu'Ana me prête une de ses robes que j'ai porté avec fierté.







A 9 heures du soir, il faisait déjà bien noir quand le service commençait. Par malchance, il y a eu une coupure d'électricité alors même que des micros et des claviers avaient été installés. Le service a alors dû commencer sans lumière ni amplification du son. Mais je dois dire que ça rendait l'évènement d'autant plus magique. Pendant un moment j'ai cru vivre un rêve, avec les voix des chanteurs qui s'entremêlaient à celle du pasteur dont je ne comprenais pas un mot mais qui envoyait un message d'amour et d'espoir. Je ne sais pas si je suis croyante moi-même, mais il m'étais impossible de rester insensible à tant de passion.




La magie s'est envolée quand le courant est revenu. Le son des micros était trop fort et les pianistes mauvais au point que l'on n'entendait plus les voix des chanteurs. Un deuxième pasteur avait remplacé le premier et avait décider de hurler dans le micro pendant une heure entière. Le message et le ressenti n'étaient plus du tout le même, ça a été pour moi un véritable supplice. J'ai alors essayé de penser à autre chose alors même que mes genoux supportaient mal la position fidjienne des jambes croisées à même le sol.

La fin était plus douce. Tout le voisinage constitué d'une trentaine de personnes de tous âges était là et bavardait tout en mangeant des gâteaux (dont celui fait l'après-midi par Nani) et en buvant du thé avec beaucoup de lait et beaucoup de sucre. Tous étaient très gentils avec moi et semblaient très heureux qu'une européenne s'intéresse à eux alors même que la plupart des touristes ne visite que les îles paradisiaques sans prêter attention à la culture locale. Trois garçons de 12 ans étaient très impressionnée par le fait que je sois française et que je vive en Australie. J'ai dû répondre à un flot de question toutes plus farfelues les unes que les autres (« Ca boxe les kangourous ? », « T'es bizarre, pourquoi tu mets pas de sucre dans ton thé ? », « La France c'est un pentagone en fait ? ») et j'étais bien contente de parler de mon pays natal (ils me croyaient pas quand je leur ai dit qu'il neigeait en France alors qu'il fait toujours 30°C aux Fidji) et de mon pays d'accueil, duquel je me sentais très proche après y avoir vécu presque 5 mois. Ils étaient d'ailleurs fascinés par les photos que j'avais prises des kangourous et des koalas lors de mon voyage à Brisbane.





Vers 11 heures, chacun est rentré chez soi, tous en me souhaitant bon voyage et en me remerciant d'être venue. Le prêtre m'a même demandé d'annuler mon voyage dans les Yasawas pour rester à Nadi. Cela m'a fait sourire et m'a touché à la fois. Ces gens que je connaissais à peine m'ont traitée comme l'une des leurs avec respect et générosité en me donnant beaucoup plus qu'ils n'avaient à offrir. J'ai pris une belle claque qui m'a remis les yeux en face des trous et m'a fait comprendre à quel point notre mode de vie est absurde. La famille de Save est peut-être l'une des plus heureuses que j'ai vue à présent, et pourtant, ses membres n'ont pas grand chose, si ce n'est le fait d'être ensembles.

C'est pour des moments comme ceux-là que je me rappelle pourquoi je suis partie si loin de chez moi. Ma famille me manque énormément mais je sais que cette expérience me sera très importante pour l'avenir. Je suis plus que jamais déterminée à mener ma barque pour arriver là où je le veux et devenir l'avocate qui défendra la justice et les droits de l'homme.



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1 commentaire:

  1. [J'avais essayé de commenter de mon iphone mais je crois que ça n'a pas marché.]
    Tu as eu tout à fait raison de faire ce voyage de cette façon et de nous montrer que la population locale, de ce qui pour nous représente la destination ultime, est si pauvre mais si généreuse.

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